Chloé Cohen, Journaliste mode responsable : « L’intervention des lois, pour accompagner les transformations, se révèle essentielle ».
Créatrice du podcast Nouveau Modèle sur la mode responsable et engagée, le féminisme et l’écologie, qui comptabilise 30 000 écoutes par mois, Chloé Cohen fait partie des premières journalistes à s’être saisies des questions liées aux enjeux sociaux et environnementaux de l’industrie textile. Que d’évolutions depuis 2018 ! Mais les combats restent nombreux.
Quel parcours vous a mené au lancement de votre podcast Nouveau Modèle ?
Chloé Cohen : J’ai suivi une formation de journaliste radio et en 2016, je suis partie suivre la présidentielle américaine, en tant que correspondante. L’univers du podcast était là-bas déjà très mature. Je me suis mise à en écouter, notamment ceux liés aux enjeux sociaux et environnementaux de l’industrie textile. Le podcast créé par l’Australienne Clare Press, The Wardrobe Crisis, m’a passionnée. A cette époque, aux Etats-Unis, un certain nombre de marques pionnières prenaient déjà la parole sur ces sujets, comme Reformation, Everlane, Patagonia… toutes originaires de la côte ouest.
En parallèle, j’ai commencé à remettre en cause ma propre façon de consommer.
En 2018, vous avez donc décidé de lancer une version française inspirée des podcasts engagés qui vous avaient tant intéressée…
C.C : En 2018, beaucoup de consommateurs français commençaient à se questionner sur ce qu’ils mettaient dans leurs assiettes ou sur leur peau mais pas encore sur les vêtements qu’ils portaient. Il n’existait pas de podcast en Français pour les éclairer.
J’ai donc créé Nouveau Modèle, pour lequel je reçois chaque semaine, une femme engagée, qu’elle soit créatrice, entrepreneure, styliste, activiste ou encore mannequin… Dans le même temps, je me suis lancée dans la rédaction d’une newsletter baptisée Une Mode Meilleure.
Quel est votre regard sur la mode responsable telle qu’elle se dessine aujourd’hui ?
C.C : Entre le moment où j’ai lancé le podcast en 2018 et aujourd’hui, la notion de mode responsable s’est démocratisée. De plus en plus de personnes ont entendu parler des enjeux sociaux et environnementaux liés à l’industrie textile, s’interrogent, lisent les étiquettes.… Et c’est une excellente nouvelle.
Mais en même temps, beaucoup de jeunes marques responsables mettent la clé sous la porte car le contexte économique est très compliqué. Il est souvent difficile pour un consommateur engagé d’aligner valeurs et budget. Le porte-monnaie ne suit pas toujours… Et on voit des marques comme SHEIN tirer leur épingle du jeu et causer bien des dégâts. L’intervention des lois, pour accompagner les transformations, se révèle essentielle.
Parlez-nous des rencontres ou des projets qui vous ont marquée ?
C.C : Il y en a tant ! Mais j’ai par exemple beaucoup apprécié mon échange avec Méline Schmit, linicultrice. Je trouve formidable de recommencer à exploiter l’une des richesses de notre terroir. Même s’il est vrai que nous avons perdu tout un pan de la filière et que le lin est souvent envoyé en Asie pour y être transformé. Cette matière première, qui a de nombreux atouts, est produite en France.
Mon projet coup de cœur, et depuis longtemps : la marque Patine, qui est à mes yeux un modèle de réussite dans la mode responsable. Ses valeurs sont très ancrées et l’équipe donne à l’innovation une place très importante. Un jean stretch sans élasthanne – très polluante – vient par exemple d’être lancé, grâce à une nouvelle matière venue d’Italie. Patine propose de plus un vrai style, années 90, qui la démarque des autres marques responsables et éthiques.
Je repense aussi à la discussion avec Dilnur Reyhan, sociologue et présidente de l’Institut ouïghour d’Europe. Quel moment intense.
Quel est le prochain défi de Nouveau Modèle ?
C.C : Réussir à trouver de nouveaux sujets sur la mode responsable, à informer, sans tourner en rond. Beaucoup de médias se sont saisis de la question et c’est une très bonne chose, mais chacun doit trouver sa place.
Que lisez-vous en ce moment ?
C.C : Je viens de commencer le dernier livre de Sophie Fontanel, « Capitale de la douceur ». Un ouvrage très poétique, qui me plaît déjà beaucoup.
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