Valoriser les invendus et favoriser l’inclusion : le double défi de Biscuiterie Handi-Gaspi.
© Handi-Gaspi
« Des biscuits bio fabriqués par des personnes handicapées à partir de pain invendu upcyclé », il fallait y penser. Alix Guyot, Louise Doulliet et Katia Tardy, 3 ingénieures agro-alimentaires, l’ont fait. Lancée en 2021, la marque Kignon, développée par la Biscuiterie HANDI-GASPI, est aujourd’hui vendue dans plus de 500 magasins bio et vrac en France.
Handi-gaspi répond au double enjeu de la lutte contre le gaspillage alimentaire et de l’insertion des personnes en situation de handicap. Comment l’idée d’un tel projet est-elle née ?
Katia Tardy : Après nos études d’ingénieures agro, Alix, Louise et moi avons toutes trois intégré des groupes agroalimentaires, français ou internationaux. Nous ne nous connaissions pas à l’époque mais nous avons pris conscience au même moment des schémas peu vertueux de l’industrie agroalimentaire, et notamment de la présence de gaspillage, sur toute la chaîne alimentaire. Notre quête de sens nous a donné envie d’apporter plus de valeur à notre métier et nous avons intégré une association nantaise, dont la mission est d’œuvrer pour l’insertion des personnes handicapées, avec un volet alimentaire. C’est là que nous nous sommes rencontrées. Et que nous avons commencé à penser notre projet.
Nous avons découvert que le taux de chômage des personnes en situation de handicap est 2 fois plus élevé que la moyenne nationale et dans le même temps, les ESAT (établissement et service d’aide par le travail) sont de moins en moins sollicités, de moins en moins visibles. Impliquer ces structures sous-exploitées dans un projet à enjeu écologique nous a semblé pertinent. Les contours d’Handi-Gaspi se sont peu à peu dessinés…
La biscuiterie Handi-Gaspi est donc née en 2021. Sur quel concept original repose-t-elle ?
K.T : Aujourd’hui en France, on continue de gaspiller 10 millions de tonnes d’aliments consommables chaque année dont 50 000 tonnes de pain chez les boulangers. L’idée est de récupérer du vieux pain bio dans les boulangeries locales et de le transformer en biscuits.
Nous avons pris nos quartiers dans l’ESAT de Savenay en Loire-Atlantique, à mi-chemin entre Nantes et Saint-Nazaire, où 30 personnes en situation de handicap travaillent pour nous.
Depuis l’automne, votre une nouvelle marque à destination de la grande distribution a vu le jour : ET TOK!. Comment embarquer les enseignes dans cette aventure circulaire et solidaire ?
K.T : Nous poussons les portes des magasins pour présenter notre démarche et nous sommes toujours bien accueillis. Qu’il s’agisse de boulangers artisanaux ou en supermarché, tous sont confrontés à la problématique du gaspillage le soir. Et l’idée ici est de transformer les invendus de pain du supermarché pour les revendre ensuite sur place. Beaucoup d’enseignes sont intéressées car elles souhaitent s’engager sur des projets concrets, sur leur territoire, et agir sur l’emploi local et solidaire.
Notre marque ET TOK! est actuellement en test dans 25 magasins de plusieurs enseignes situées en région nantaise.
Pourquoi est-il également important d’organiser des points de rencontre avec les consommateurs en magasin ?
K.T : Chaque semaine, nous programmons au moins cinq animations pour expliquer de vive voix l’histoire qui se cache derrière nos biscuits … et pour les faire goûter ! Les personnes avec qui nous échangeons comprennent bien la dimension militante dans l’acte d’achat que nous leur proposons mais sont encore nombreuses à penser que les produits issus de l’anti-gaspi ne peuvent pas être bons. Nous sommes là pour leur prouver le contraire.
Comment les 30 personnes qui travaillent pour Handi-Gaspi vivent-elle cette aventure professionnelle ?
K.T : Elles sont heureuses et fières. Auparavant, l’ESAT de Savenay était uniquement sollicité pour de la mise en cartons ou la mise en sachets de produits d’hygiène. Avec nous, les travailleurs sont impliqués sur toute la chaîne de valeur : réception des pains, transformation en biscuits, conditionnement, préparation des commandes, livraison en magasins… Sans oublier la dégustation des nouvelles recettes.
Nos biscuitiers sont toujours contents d’être filmés, photographiés et interviewés alors qu’ils avaient l’impression d’être un peu cachés auparavant.
Et bien sûr, nous les tenons toujours informés des Prix que nous gagnons car ces Prix…c’est grâce à eux que nous les remportons !