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La voiture connectée, un nouveau canal de vente.

La voiture connectée, un nouveau canal de vente.
Crédits photo : image générée via Midjourney

Digitalisée des jantes jusqu’aux sièges, bardée d’applications et de capteurs, boostée aux algorithmes, la voiture connectée peut transmettre des données en temps réel et communiquer avec n’importe quelle plateforme numérique, y compris les sites de e-commerce. Un nouvel horizon est en train d’apparaître dans le ciel des retailers.

 

Selon l’étude « Monétisation des données automobiles » réalisée en mai 2023 par le cabinet d’audit et de conseil KPMG, le marché mondial de la data automobile pourrait peser entre 250 et 400 milliards de dollars en 2030, en fonction de la croissance du volume de données issues du parc des voitures connectées, dont la progression est constante depuis presque dix ans. Selon le cabinet Counterpoint, après des ventes globales en augmentation de 12% en 2022, les voitures connectées représentent désormais plus de 50% des véhicules neufs ou d’occasion proposés à l’achat. Selon l’étude Unlocking the full life-cycle value from connected-car data du cabinet McKinsey, 95 % des nouvelles automobiles mises sur le marché d’ici 2030 seront connectées. A terme, ce sont près d’un milliard de véhicules reliés à internet qui pourraient être en circulation à travers le monde. Une montée en puissance tout à fait concrète. 

La voiture est donc appelée à devenir un élément à part entière du réseau internet et un maillon supplémentaire du monde numérique.  Toujours plus autonome et toujours plus servicielle grâce à l’IA et à l’IoT, elle ne sera plus, dans un avenir proche, un simple moyen de transport, mais un endroit où il sera possible de s’informer, de consommer du contenu en ligne, de découvrir de nouveaux produits et d’effectuer des achats. De fait, tout indique que la voiture connectée va devenir un nouveau canal de vente. A quoi peut-on s’attendre ?

 

New deal automobile.

 

Aujourd’hui, aux États-Unis, la plupart des voitures neuves sont équipées d’un accès internet intégré. D’ores et déjà, ce sont presque cent millions de voitures connectées qui circulent sur les routes nord américaines, générant chacune 25 GO de données par heure, l’équivalent en moyenne de 2 mois de navigation sur le web. Ce n’est cependant qu’une première étape, comme le précise Soumen Mandal, analyste chez Counterpoint. « La transition vers la numérisation des voitures est en train d’accélérer à un rythme rapide. Ce marché devrait croître de 13% par an dans les dix prochaines années. Pour l’instant, il est dominé par la 4G. D’ici 2030, plus de 90% des voitures auront une connectivité 5G plus rapide qui générera toujours plus de données ». Par ailleurs, la digitalisation, mais aussi l’électrification des véhicules, favorise la création d’architectures IT spécifiques, possédant des réseaux sécurisés à large bande passante qui garantissent à la fois la protection des données et la vitesse de navigation. 

Une tel volume de datas, à la fois parfaitement exploitable et entièrement protégé, peut trouver d’innombrables applications. C’est ce qui a poussé constructeurs automobiles, géants du numérique et acteurs des fintechs à opérer des rapprochements pour mettre au point des systèmes de paiement embarqués, prérequis indispensable avant d’opérer une monétisation plus poussée des données. Dès 2016, Alibaba a entamé une collaboration avec le constructeur chinois SAIC Motor Corp pour intégrer le service de paiement Alipay dans les nouveaux véhicules du groupe, permettant ainsi aux conducteurs de payer leur plein d’essence depuis leur habitacle. Dans cette même logique, Ford a intégré l’assistant Alexa d’Amazon dans certains de ses modèles, Volkswagen a racheté l’application PayByPhone, Daimler a fait de même avec PayCash Europe pour proposer la solution « Mercedes Pay ». 

Pour les constructeurs, il s’agit aussi de concevoir des véhicules capables de faire fonctionner de nouvelles applications sur la durée, sans avoir à modifier leur architecture IT. Pour ce faire, Peugeot a développé la boîtier Smart Antenna qui peut à la fois diffuser la TNT et se connecter au réseau. « Cette boite wifi dans le véhicule permet de faire le lien avec l’extérieur. Elle est compatible avec les normes existantes : la 4G, la 3G, la TNT ou le Bluetooth et pourra demain accueillir de nouvelles normes sans toucher au véhicule » explique Laurent Dizambourg, chef de projet innovation chez Stellantis. 

Perfectionner la technologie et démultiplier les offres permet de démocratiser efficacement ces nouvelles propositions. Pour les acteurs de la mobilité et du digital, les voitures connectées représentent une manne potentiellement énorme. C’est également le cas pour les retailers. 

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L’ère du « in- vehicle commerce ».

 

D’ici 2030, toujours selon l’étude Unlocking the full life-cycle value from connected-car data du cabinet McKinsey, 45 % des voitures neuves dans le monde disposeront, grâce aux données, d’une technologie de personnalisation des offres de services et de contenus basée sur les préférences des passagers, ce qui permettra à ceux-ci de disposer de programmes de promotion et de divertissement sur-mesure. 

A titre d’exemple, aux Etats-Unis, Waze, une application GPS appartenant à Google, a récemment collaboré avec McDonald’s sur un projet de publicité embarquée impliquant plus de 300 panneaux d’affichage numériques. Les utilisateurs de Waze qui passaient à proximité des panneaux recevaient des offres sur leurs smartphones, ainsi que des indications pour se rendre au McDonald’s le plus proche. En huit semaines, cette campagne a permis de toucher 1,9 million d’utilisateurs de Waze, et incité 8 400 personnes à faire une pause pour déguster un hamburger. A date, en plus de Google, Facebook, Apple, Microsoft et Amazon cherchent eux aussi à exploiter ce nouveau filon. 

De façon plus générale, la connectivité fait apparaître de nouveaux modèles économiques centrés sur l’expérience client, les programmes de fidélité, la conciergerie embarquée, les paiements mobiles, la vente de biens et de services. Le « in-vehicle commerce » est un concept qui ouvre de nombreuses possibilités. 

D’ores et déjà, il permet, en gardant les mains sur le volant, l’acquisition de nouveaux produits par reconnaissance vocale, mais aussi la réservation de places pour un spectacle ou la livraison de repas à domicile. C’est ce que propose déjà l’application Mavi.io, utilisable depuis l’écran du tableau de bord d’un véhicule, en permettant de faire des achats immédiats grâce à la solution de paiement et de livraison OnMyWay™ . L’application connecte le conducteur aux plateformes de e-commerce, puis gère la commande et le timing de livraison à partir des données transmises par la voiture. 

De son côté, Qualcomm, géant américain des technologies mobiles qui entend accélérer la transformation digitale de la mobilité, propose aux retailers une solution « in-vehicle commerce » basée sur la solution IoT Snapdragon, également accessible depuis le tableau de bord et déjà présent dans certaines Volvo. Pour autant, il y a encore mieux à venir. 

 

 La voiture autonome, futur temple du e-commerce.

 

En intégrant toujours plus de technologies numériques pour simplifier et accompagner la conduite, comme l’aide au stationnement, les systèmes anti-collisions, la détection des angles morts, le contrôle de l’attention du conducteur ou la régulation de vitesse, les voitures connectées ne cessent de gagner en autonomie, jusqu’à ce qu’elles deviennent un jour entièrement autonomes. C’est l’objectif de la plupart des constructeurs. En France, les voitures autonomes de niveau 3, capables de conduire par elles-mêmes grâce à des équipements avancés de détection et de perception, mais dans des conditions spécifiques et avec une supervision humaine, sont autorisées à circuler depuis le 1er septembre 2022. C’est également le cas en Allemagne, aux Etats-Unis, en Chine et au Japon. Mercedes-Benz, Honda, et Peugeot commercialisent déjà des modèles de ce type, tandis que BMW, Fiat, Opel et Citroën travaillent sur le sujet. De leur côté, Jaguar et Range Rover ont annoncé équiper, dès 2025, tous leurs nouveaux modèles d’un « environnement digital sophistiqué »,  conçu en partenariat avec NVidia, leader mondial du calcul informatique, qui permettra ce genre de performance. Un cran plus loin, Tesla propose déjà un modèle Autopilot Full Self Driving (FSD), entièrement autonome, sans aucune intervention humaine; ce qui représente le niveau 5,  sur le marché américain et bientôt sur le marché chinois. 

Cette évolution est appelée à reconfigurer les véhicules, et  notamment l’habitacle qui va devenir, bien plus qu’il ne l’est aujourd »hui, un espace entièrement dédié à la sociabilisation et à la consommation de contenus, laissant plus de place aux dispositifs digitaux. Débarrassés de la conduite, passagers et conducteurs peuvent consacrer leur temps de trajet à des activités de loisirs, ce qui donne l’opportunité de proposer toujours plus de services. Tout indique que la voiture autonome va être un puissant accélérateur du « in-vehicle commerce » aussi bien pour stimuler les achats que pour optimiser les livraisons, d’un bout à l’autre de la chaîne des ventes. Carrefour mise ainsi sur une navette autonome, conçue avec la start-up Goggo Network, pour développer une offre de e-commerce à destination des zones rurales, où la livraison à domicile n’est généralement pas rentable. 

Pour accélérer le mouvement, Amazon Web Services (AWS) permet aux constructeurs automobiles de créer des « applications IoT sans serveur » qui collectent, traitent, et analysent les données des véhicules connectés, sans avoir à gérer aucune infrastructure. 

La collaboration toujours plus étroite entre les acteurs du numérique, de la mobilité et du retail ne peut qu’accélérer la croissance du « in-vehicle commerce », et encore davantage lorsque les voitures seront majoritairement autonomes. 

Pour toutes ces raisons, dans un avenir proche,  la monétisation des données produites par les véhicules connectés deviendra l’élément fondateur d’une nouvelle économie basée sur la mobilité. A terme, chaque voiture mise en vente sur le marché, qu’elle soit électrique ou thermique, disposera d’une connexion inernet, de moyens de paiement embarqués et de technologies par commande vocale. Sachant qu’un européen passe en moyenne 9h35 par semaine  au volant, et un français dix heures, l’impact sur le e-commerce sera énorme.