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Les nouveaux emplois du retail de demain.

Avec d’un côté la montée en puissance de l’IA et de l’autre la réponse à apporter au réchauffement climatique, les métiers du retail sont en pleine transformation. Quels nouveaux emplois pourraient apparaître dans un avenir proche ?

 

Selon l’Organisation Internationale du Travail, 85% des professions qui seront exercées en 2030 n’existent pas encore. La digitalisation des entreprises à des niveaux toujours plus élevés combinée à l’accélération vers des modèles organisationnels guidés par la donnée et l’algorithme chamboulent le marché de l’emploi, obligeant un nombre croissant de collaborateurs à posséder des compétences numériques toujours plus fines, qui nécessitent d’être régulièrement réévaluées. Preuve de cette redistribution des cartes, une étude réalisée en mai 2023 par Pôle Emploi révélait que 35% des entreprises françaises utilisaient déjà l’IA ou prévoyaient de le faire bientôt. Ce n’est cependant qu’un début tant cette technologie est en train de devenir un levier incontournable de création de valeur. 

A l’autre bout de la chaîne, le réchauffement climatique, et la préoccupation de plus en plus grande des consommateurs quant aux désordres qu’il pourrait provoquer, bouscule lui aussi la dynamique du travail. En favorisant une transformation radicale de l’économie vers un fonctionnement de plus en plus circulaire, en faisant de la RSE un enjeu stratégique pour toutes les entreprises, et en les contraignant à repenser leur chaîne de valeur, ce phénomène participe également à faire évoluer le paysage des métiers. 

Dans chaque secteur d’activité, ces changements majeurs font naître de nouveaux besoins en recrutement, quand ils ne nécessitent pas l’invention de fonctions qui n’existaient pas jusqu’alors. A quoi peut-on s’attendre en matière de retail ? Quels sont les nouveaux emplois qui pourraient bientôt voir le jour ?  Quelles sont ceux déjà opérationnels qui vont prendre de la valeur ? 

 

Smart Data Officer.

 

Aujourd’hui, les clients produisent une quantité de données toujours plus importante à chaque étape de leur parcours d’achat, que ce soit sur internet ou dans les points de vente physiques. Longtemps focalisés sur la meilleure façon de tirer partie de cette gigantesque masse d’informations, les retailers ont désormais intérêt à privilégier le Smart Data, une approche parallèle au Big Data qui permet d’ extraire et de qualifier plus efficacement les données les plus pertinentes pour augmenter les ventes.  

Pour les y aider, le Smart Data Officer a pour mission d’alimenter les équipes commerciales en données fines, qualifiées, et individualisées. Il produit une modélisation prédictive, évolutive et personnalisée des habitudes d’achat à laquelle il associe les différentes recommandations qu’il est possible d’adresser à chaque client. Il est en mesure d’identifier les produits qui ont le potentiel d’acquisition le plus élevé en tenant compte des spécificités de chaque canal de vente. Il est capable de voir ce que le Big Data ne peut pas voir.  

C’est un atout concurrentiel décisif, comme l’explique Franck Zulian, CEO de Stackr, une entreprise spécialisée dans l’amélioration du traitement des données : « Nous aidons à identifier les 5 à 6 produits phares dits « cachés », ceux qui se vendent bien malgré un faible passage de visiteurs devant. Ce sont autant de produits qui mériteraient d’être placés en tête de gondole pour accélérer les ventes. On offre aussi une visibilité sur le nombre de clients accueillis par un vendeur. Un tel système de tracking intelligent deviendra un outil de management dans les prochaines années. »  

 

Responsable de la Seconde Vie.

 

Selon l’Ademe (Agence de la transition écologique), l’économie circulaire pourrait créer jusqu’à 250 000 nouveaux emplois en France dans les prochaines années. 

De fait, avec la démocratisation de plus en plus prononcée de cette pratique vertueuse, dont témoigne le succès rencontré par les produits de seconde main, un nombre croissant de retailers développent une offre allant dans ce sens, ouvrent des départements spéciaux, et complètent leurs effectifs avec des spécialistes de la revalorisation. 

 Dans cette dynamique, le Responsable de la Seconde Vie a pour rôle de superviser la commercialisation des articles de seconde main, d’en garantir la qualité auprès des consommateurs, de développer de nouvelles offres et d’acculturer les équipes de vente à l’économie circulaire. 

C’est déjà plus ou moins ce que fait déjà Martin Aunos, Directeur de la Business Unit en charge de l’économie circulaire de Fnac Darty, premier groupe en France à avoir créé un poste de ce type, avec, pour reprendre les mots du communiqué annonçant sa nomination, la responsabilité de « revaloriser l’ensemble des produits non vendables neufs issus des flux internes à travers le reconditionnement, le recyclage ou encore le don, développer l’offre de produits reconditionné pour répondre aux nouvelles demandes des consommateurs, et déployer une stratégie de sourcing produits vertueuse au sein de l’écosystème du groupe (fournisseurs, acteurs partenaires du reconditionnement, clients B2B et B2C…) »

A noter que la fonction de Responsable de la Seconde Vie peut être complétée, à un niveau hiérarchique plus bas, par celle Chef de projet en économie circulaire dont la mission consiste, selon l’Institut supérieur de l’environnement, à « élaborer des projets innovants d’éco-conception, de gestion des ressources, de recyclage, d’en définir la feuille de route stratégique, de planifier les actions à mener, et d’accompagner de manière concrète et technique les parties prenantes. »

 

Metaverse Merchandiser. 

 

En spatialisant internet, les mondes virtuels ont ouvert un nouveau champ des possibles pour les retailers en leur donnant la possibilité de communiquer avec les jeunes générations, ces consommateurs de demain qui passent plus de temps à jouer à Fortnite rivés devant leur écran qu’à arpenter les points de vente à la recherche d’un produit à la mode. Pour les marques, le potentiel commercial est gigantesque. Selon une enquête réalisée en 2023 par l’agence de communication Marco, 25% des 300 millions d’utilisateurs que compte actuellement le metaverse à travers le monde  y viennent avant tout pour faire des achats. D’après Bloomberg Intelligence, ce marché pourrait atteindre un chiffre d’affaires de 800 milliards de dollars dès cette année. Les retailers ont donc tout intérêt à positionner correctement leurs pions sur ce nouveau canal de vente. C’est même un enjeu d’avenir comme l’explique Katy Trodd, consultante spécialisée en visual merchandising et en marketing digital :   » Il est indéniable que le metaverse a la capacité d’attirer de nouveaux clients. Pour les générations Z et Alpha, acheter dans cette nouvelle configuration pourrait devenir la norme. Il n’est pas impensable que dans peu de temps, les clients qui viennent en magasin souhaitent savoir si tel produit est disponible dans sa version numérique. »  

Pour que les marques puissent négocier au mieux cette évolution, le Metaverse Merchandiser a un rôle proche de celui du Visual Merchandiser. Il a pour mission d’imaginer et de modéliser les présentations de produits virtuels les plus attractives, afin de valoriser au maximum la marque auprès des utilisateurs et de les inciter à l’achat. Cet expert du storytelling doit également nouer des partenariats avec les plateformes de jeux pour augmenter la visibilité des produits.  

 

Responsable de la commercialisation des services. 

 

Selon l’Insee, les biens durables représentent aujourd’hui 8,1% de la consommation finale des Français, contre seulement 3,1% en 2017. Alors que la préoccupation écologique concerne désormais l’ensemble de la société, la durabilité des produits s’impose comme un facteur de réassurance des consommateurs, et oblige les retailers à mettre l’accent sur le réemploi et le recommerce. Ce new deal leur permet de proposer une large gamme de services qui aident les clients à conserver leurs produits le plus longtemps possible. 

Pour permettre aux enseignes d’accélérer dans cette direction, le rôle du Responsable de la commercialisation des services est de développer le chiffre d’affaires du retail en dehors de la vente de produits neufs. Il supervise et améliore en permanence les offres d’entretien, de réparation et de maintenance qui sont proposées aux clients. Il est force de proposition pour concevoir et mener à bien des campagnes qui font connaître et qui valorisent ces nouvelles pratiques. En interne, il a par ailleurs pour mission de vérifier que les équipes qui sont sous sa responsabilité ont toutes le même niveau d’information sur l’économie circulaire. 

 

Architecte de l’expérience client.

 

Selon l’étude Experience is everything: Here’s how to get it right du cabinet PwC, 86 % des acheteurs sont prêts à payer plus cher lorsque l’expérience client est pleinement satisfaisante. Pour toutes les marques, ce que vivent les consommateurs lors de leurs parcours d’achat est devenu un facteur essentiel de séduction et de différenciation. Un nouveau graal dont la force de frappe semble être sans limite pour attirer et fidéliser les clients. 

Alors que la montée en charge du M-commerce diversifie les canaux de vente en ligne, que les magasins physiques sont en pleine réinvention, et que l’omnicanalité est devenu un enjeu stratégique majeur,  il faut pouvoir apporter de la cohérence à l’ensemble des interactions qu’un client peut avoir avec une marque, tout en garantissant que ces interactions seront systématiquement fluides et attractives. 

C’est le rôle joué par l’Architecte de l’expérience client. Véritable orfèvre qui cisèle les parcours d’achat pour les rendre spectaculaires, extraordinaires et mémorables, tête pensante qui conçoit et met en oeuvre les stratégies omnicanales, défricheurs de nouveaux concepts et de nouvelles tendances, c’est à la fois un expert du e-commerce et un parfait connaisseur des points de vente physiques qui opère en permanence la jonction entre le virtuel et le réel. Il a également pour mission d’acculturer les équipes aux dispositifs qui sont déployés en ligne et hors ligne, et de rester constamment à l’affût des dernières innovations. 

A cette liste, il est possible d’ajouter d’autres emplois qui pourraient prochainement voir le jour, comme ceux de Consultant en gamification, de Responsable IoT, de Gestionnaire de la durabilité… Dans le retail, les opportunités de création de nouveaux rôles vont devenir plus nombreuses à mesure que le secteur avancera dans sa mue numérique et écologique.