TOP

[Dossier] Les dirigeantes du retail #1 : Karine Schrenzel, la big boss du e-commerce.

Karine Schrenzel, cofondatrice et dirigeante du groupe Shopinvest et PDG des 3 Suisses et de Rue du Commerce. © Shopinvest

Nous ouvrons cette série spéciale consacrée aux femmes patronnes avec Karine Schrenzel, cofondatrice et dirigeante du groupe ShopInvest, PDG des 3 Suisses et de Rue du Commerce. L’occasion de faire le point avec elle sur la façon dont elle repense l’acte d’achat en ligne et sur son expérience de femme chef d’entreprise.

 

3 SUISSES, Rue du Commerce, Bijourama.com, vous avez repris de nombreux sites de e-commerce. Comment faites-vous vos choix de rachat ?

 

Ce qui nous guide avant tout, c’est la recherche d’une marque qui parle à tous, mais aussi un vrai savoir-faire dans le sourcing et la création de produits. Sur la partie high-tech, nous avons eu la chance incroyable de pouvoir reprendre Rue du Commerce qui est un pionnier du e-commerce en France et qui s’est lancé en 1999 et côté mode et maison de racheter 3 SUISSES qui est une marque qui fait écho à toutes les générations. L’existence de partenaires et fournisseurs qui nous suivent et nous aident à nous développer est également un critère important.

 

Comment faites-vous pour réussir à humaniser l’achat en ligne ?

 

Il est essentiel à mon sens de redonner un côté plus humain au  e-commerce qui est efficace mais froid. Pour cela, nous prenons en compte la propre spécificité de chaque site. Sur Rue du Commerce, nous essayons par exemple d’avoir beaucoup d’interactions avec les clients via les notations et les commentaires produits. Pour 3 SUISSES, le retour du catalogue a clairement fait partie de cette dynamique. Nous avons aussi fait le choix d’interroger 10 000 femmes qui co-contruisent avec nous la marque depuis que nous l’avons rachetée mais aussi d’adapter notre offre produit en valorisant de jeunes DNVB françaises, grâce à notre programme 3S x Impact.

ShopInvest acquiert les 3 Suisses en 2018. © ShopInvest

Quels sont les grands défis qui attendent justement les 3 Suisses ?

3 SUISSES a 90 ans et il y a plein de choses à mettre en place pour les 90 prochaines années. Notre objectif est de redevenir le Chouchou des Françaises et des Français en proposant une offre choisie et sélectionnée (et non pas un listing sans fin de produits) et des produits toujours plus responsables. Nous avons fait un virage important depuis le rachat en optant pour beaucoup de productions françaises pour nos propres produits, des circuits courts et des collections plus raisonnées pour éviter les surstocks. Notre 2e défi, c’est de développer l’écosystème d’entrepreneurs français autour de 3 SUISSES : on a lancé le programme 3S x Impact pour soutenir de jeunes entrepreneurs engagés. Nous leur permettons d’émerger et d’avoir des circuits de distribution avec des bases de données plus larges et ils nous apportent une offre très différenciée et unique pour nos consommateurs.

Vous parlez de circuits courts mais est-ce possible de produire en France ?

C’est certain que ça a été un gros défi et que ça le reste encore tous les jours car nous avons voulu maintenir le fait que les 3 SUISSES  restent une marque mode accessible surtout dans le contexte actuel. Selon les produits, nous sommes donc parfois confrontés à des ruptures de stocks parce qu’on produit moins et nous sommes aussi obligés de rogner sur notre marge brute car évidemment produire dans l’Hexagone coûte plus cher mais à l’inverse, nous faisons aussi moins de surstocks. Produire en France nécessite clairement de se réinventer et d’apprendre à avoir un circuit produit différent mais ce qui est certain, c’est que le savoir-faire français existe toujours et que c’est possible de produire ici.  

Les femmes patronnes sont peu nombreuses. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’entreprendre ?

C’est clairement très prenant d’être entrepreneure mais c’est aussi très exaltant. Ce que j’aime, c’est le fait de construire, créer et faire adhérer une équipe vers une même vision. J’ai toujours eu envie d’entreprendre. Ma grand-mère paternelle m’a beaucoup inspirée, elle a eu une vie assez difficile mais elle travaillait, parlait cinq langues, était extrêmement cultivée. Elle m’a appris à toujours me dépasser. J’ai commencé ma vie professionnelle assez classiquement au départ dans un cabinet de conseil (McKinsey) puis dans un fond d’investissement (Cinven), j’ai eu la chance de rencontrer des entrepreneurs hors normes et ça m’a donné encore plus envie de me lancer. 

Vous semblez avoir un parcours sans failles. Avez-vous été confrontée à l’échec dans votre parcours ?

Je crois que c’est impossible que tout aille bien tout le temps. Le propre de l’entrepreneur, c’est justement d’accepter de se lancer, tout en sachant que la réalité ne sera jamais exactement ce qu’on en attendait et qu’il faudra peut-être changer tout son business plan.  A titre d’exemple, j’ai commencé dans la cosmétique pour hommes. Les études disaient que le marché allait exploser dans les années à venir avec 150 à 200% de croissance, et pourtant… le marché n’a pas dépassé 3 ou 4%. J’ai alors décidé de faire ce que je savais déjà, à savoir racheter des sites puisque j’avais travaillé en fond d’investissement. C’est comme ça que ShopInvest est né. Il faut savoir se réinventer. 

Avez-vous l’impression que cela change quelque chose d’être une femme patronne ?

Dans le travail, j’ai toujours mis en avant les compétences, que ce soit les miennes ou celles de mon équipe. Ainsi, dans le recrutement par exemple, je n’ai jamais privilégié les femmes ou les hommes et résultat, il y a une parité quasi parfaite chez ShopInvest aujourd’hui. Je n’ai pas l’impression d’avoir dû adopter un code qui n’était pas le mien pour manager. En revanche, j’offre peut-être à l’équipe un côté plus familial et humain.

Karine Schrenzel et son mari Olivier Gensburger
Karine Schrenzel et son mari, Olivier Gensburger © ShopInvest

Vous avez trois enfants tout en étant chef d’entreprise. Comment avez-vous trouvé un équilibre ?

Je rentre tous les soirs les coucher et je retravaille souvent après. C’est souvent régulièrement la course ! Mais j’ai la chance de Je travailler avec mon mari, Olivier Gensburger. Nous sommes un vrai duo de confiance car on avance ensemble avec la même vision et les mêmes envies. Le fait de pouvoir s’épauler, s’entraider si besoin, c’est certain, c’est une des vraies clés du succès de ShopInvest aujourd’hui.

Consulter l'intégralité du dossier :

Les patronnes françaises sont (bien trop) rares. Et invisibles. En partant de ce constat, la franco-britannique Elodie Andriot a voulu leur consacrer un livre.

Cathy Collart Geiger a débuté comme chef de rayon d’hypermarché à 23 ans. Deux décennies plus tard, elle est PDG de l’entreprise Picard Surgelés.