Start-up de la semaine : Grâce à Graffiti, vous pointez, vous savez
Dans le marché prometteur de la reconnaissance visuelle, qui devrait peser 27 milliards de dollars en 2027, selon une étude de Zion Market Research, Graffiti trace sa route. La start-up marseillaise, créée en 2019, propose aux utilisateurs de pointer la caméra de leur Smartphone sur les produits pour accéder instantanément, en réalité augmentée, à toutes les informations dont ils ont besoin (fiche produit, les promos, impact carbone, note éthique…). Entretien avec sa cofondatrice, Marie Tors.
Avant de proposer la solution Graffiti telle qu’elle existe aujourd’hui, vous êtes passés par la case B2C. Comment le concept a-t-il évolué au fil des mois et des années ?
Marie Tors : Avant notre association, Said Hadjiat dirigeait une importante application de messagerie, qu’il a revendue en novembre 2018. Nous travaillions déjà ensemble et nous avions identifié que cette branche de l’intelligence artificielle qu’est la reconnaissance visuelle était un marché porteur, qui nous intéressait beaucoup. Nous avons lancé Graffiti le 19 mars 2019 et avons été rapidement rejoint par David Cochard, spécialiste en IA et en Réalité Augmentée.
Une première version de l’application a été testée en juillet 2019 au Delta Festival, à Marseille. Nous proposions alors aux utilisateurs d’ancrer, à certains endroits, des vidéos qu’ils créaient eux-mêmes, pour permettre à d’autres personnes d’y accéder, dans la journée, quelques jours ou même quelques mois plus tard. En parallèle, le Festival nous a proposé de mettre au point un plan du festival en réalité augmentée.
Le bilan des 3 jours a été sans appel : le volet réseau social tel qu’on l’avait imaginé, avec la dépose de contenus par les utilisateurs, avait beaucoup moins suscité l’intérêt que l’emplacement des scènes, des toilettes ou encore du stand de bières.
Nous avons donc décidé de nous concentrer uniquement sur les informations que souhaitait transmettre une entreprise. Et pour ne pas partir tous azimuts, nous avons dédié Graffiti au retail, où les besoins sont réellement importants, tant du côté client que du côté vendeur.
Mais toute l’expérience acquise en B2C s’est révélée être un énorme atout pour nous.
Quels sont les bénéfices de Graffiti pour les retailers ?
M.T : Aujourd’hui, les marques et les enseignes peuvent facilement envoyer toutes leurs infos sur un site Internet, rattraper des paniers, pousser des notifications… C’est un univers à part entière. Mais dans le magasin, paradoxalement, le consommateur s’échappe souvent sur Internet pour aller chercher des renseignements.
L’idée de Graffiti est de mélanger le meilleur des deux mondes, de permettre aux clients de rester plongés dans un univers physique tout en accédant à l’information digitale instantanément.
Comment fonctionne Graffiti concrètement ?
M.T : Nous travaillons en partenariat avec les marques et les retailers pour déployer l’application en magasin. Cette application ne nécessite pas de téléchargement : elle est lancée par un QR code scanné à l’entrée du rayon, permettant d’accéder directement
à la solution. Le client pointe ensuite son Smartphone vers le rayon et peut accéder à tout un tas d’informations en réalité augmentée, allant de la fiche produit, aux promos en passant par l’impact carbone. Il peut également activer des filtres pour ne voir apparaître par exemple que les produits sans gluten, sans sulfite ou bio, indiqués à l’aide de petites pastilles vertes.
© Graffiti
En quoi la solution est-elle aussi un atout aussi bien pour le client particulier que pour le vendeur ?
M.T : Je peux vous citer l’exemple précis de Deutsche Telekom, auprès de qui nous avons remporté un appel à projets international en juillet 2022. 4.500 magasins T-Mobile vont être équipés en Europe et aux USA.
La problématique de Deutsche Telekom était la suivante : quand les clients arrivaient en magasin, ils attendaient bien souvent plus d’une heure pour avoir l’information qu’ils recherchaient, à savoir le prix exact du téléphone qu’ils souhaitaient acheter. C’était très déceptif pour eux, comparé à l’expérience d’Internet où ils trouvaient quantité d’informations. Lorsqu’ils s’étaient renseignés avant de se déplacer, ils venaient avec deux ou trois idées précises en tête. Le vendeur, de son côté, ne pouvait pas être expert de tous les produits car il rentrait chaque mois une cinquantaine de nouveautés !
Graffiti offre une expérience beaucoup plus fluide pour le client et se révèle être un outil d’accompagnement pour le vendeur. Leur lien se trouve d’ailleurs renforcé par le côté ludique de la réalité augmentée.
Quels produits se prêtent plus particulièrement à l’utilisation de votre solution ?
M.T : Il s’agit bien souvent d’un shopping qui concerne des produits que l’on a envie de bien connaître avant l’acte d’achat, comme le vin, la high tech, l’électronique, certaines catégories alimentaires et bien sûr la cosmétique. Nous venons d’ailleurs de signer une grande surface de bricolage et équiperons courant 2023 les rayons vins de deux enseignes nationales.
A quoi vont ressembler les prochains mois de Graffiti ?
M.T : Graffiti a été sélectionnée par Business France pour représenter la France avec 39 autres start-up à la NRF, qui s’est tenue à New-York du 15 au 17 janvier 2023. Nous avons établi de nombreux contacts et à notre retour les mails ont commencé à pleuvoir. Et cela risque de s’accentuer car nous allons bientôt à EuroShop, à Düsseldorf. Pour faire face à cet intérêt croissant pour notre solution, nous comptons mener deux défis dans les mois prochains : recruter ; et… ralentir. Notre objectif est en effet d’apporter une réponse propre à chacun de nos clients et d’avancer doucement et sereinement. Pour ensuite amorcer la phase d’accélération. Chaque étape est importante et actuellement nous devons prendre le plus de recul possible.
© Arnaud Thizy
Le clin d’œil futuriste
« Peut-être se débarrassera-t-on un jour des smartphones pour enfiler des lunettes ou porter des lentilles qui afficheront les informations en réalité augmentée ! » Marie Tors